Jamais content (encore une fois)En ce jour de juillet et de non-anniversaire de ce blog (nous ne sommes plus le 3 juillet), passons, si vous le voulez bien, à autre chose,
séance tenante.
Des takesRevoir Godard hier soir - en baissant la tête, c'était à la télévision. Jean-Pierre Léaud (absent ici) est comme d'habitude fantastique et Jean-Philippe Smet n'aura jamais un rôle aussi bon. Revoir Paris au cinéma filmée comme rarement et le Concorde St-Lazare où Benoît Jacquot tourna plus tard
La Fille Seule. Du son, de l'image, ce n'est plus Sonimage mais JLG Films.
On achève bien les pauvres"Soit dix femmes de ménage qui organisent un système de covoiturage pour se rendre cinq jours par semaine de leur domicile, en Moselle, à leur lieu de travail, dans les bâtiments qui abritent les institutions européennes de Luxembourg. Soit une société française de transports en commun qui exploite une ligne sur le même parcours. Si le monde tournait rond, on y verrait deux exemples pertinents de lutte contre la saturation de l'axe routier Metz-Luxembourg. On pourrait même applaudire des initiatives minimes mais salutaires dans la lutte contre l'effet de serre (194 microgrammes d'ozone par m3 d'air mesurés à Thionville le 28 juin, et 195 cinq jours plus tôt ; le seuil d'information des populations est fixé à 180 microgrammes/m3). Mais le monde ne tourne pas rond."
(
Préférer sa voiture au bus peut vous conduire au tribunal,
Libération)
Développer/se développer
"Tout homme normal est épouvanté par le martyre des populations africaines. Les quatre cavaliers de l'apocalypse que sont la soif, la faim, la guerre et les épidémies ravagent l'Afrique. Le paludisme est de retour ; 26 des 36 millions de sidéens du monde sont sur ce continent ; l'eau polluée y affecte 1,2 milliard d'êtres humains. Chacun s'en émeut. Mais la stratégie du G 8 et des objectifs du Millénaire est d'une totale hypocrisie. Plutôt que d'augmenter l'aide au développement, il faudrait changer les structures. Dans le domaine agricole, par exemple, rien n'est fait. Au marché de Dakar, les fruits et légumes français sont environ 40 % meilleur marché que les produits sénégalais. Plutôt que de donner plus, il faudrait voler moins. Je ne critique pas le don : chaque euro donné à un organisme humanitaire, c'est un peu de vie et cela n'a pas de prix. On ne peut pas non plus être contre l'objectif du Millénaire visant à faire passer l'aide publique au développement à 0,4 % du Produit intérieur brut. Mais c'est insuffisant. Panser les blessés, c'est bien ; retenir le bras de l'assassin, ce serait mieux."
(
Interview de Jean Ziegler,
Ouest France)
Expert consultant en ergonomie : un métier d'avenirAu
Journal du Net, on ne se moque pas du monde. Ainsi, lorsqu'il s'agit de faire
un article sur le nouveau site du Louvre, on convoque une "journaliste" et une "experte consultante en ergonomie". Après lecture de leur prose, on ne peut être que convaincu :
"Au total, cette nouvelle version aura nécessité quatre ans de travail, dont une année de définition du projet, une année d'appels d'offre, une année d'écriture des nouveaux contenus et une année de développement, pour un budget de 7 millions d'euros dont 4 en cash."
Toutefois, aucune mention d'un bug un peu embêtant : Utilisateurs de Firefox et internautes qui ont le malheur d'être sur Mac, amusez-vous à cliquer sur la rubrique "mode d'emploi" qui vient renforcer les rubriques "aide" et "plan du site" déjà un peu redondantes
sur la page d'accueil dudit musée.
Les experts et journalistes du
Journal du Net, ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît.
Art de la guerre"Il y a deux façons de considérer le chômage. Dans l'optique de la rentabilité du capital et du patrimoine financier, le chômage, c'est la variable d'ajustement. La finalité c'est le profit et le fric, et le chômage n'est pas le problème : c'est la solution ! Alors on fait semblant de le dénoncer et d'agir contre. Vous savez, moi j'ai l'habitude de rentrer dans la logique du discours des autres : ils disent qu'il faut rémunérer la productivité des gens ? Eh bien, faisons-le ! Quand on licencie, les chômeurs deviennent des agents actifs de cette productivité ! Il faut donc les récompenser et les payer justement ! La prime de Noël, c'est normal ! J'aime bien piéger les gens à leur propre discours... Et le discours de la flexibilité dit bien que le chômage n'est pas le problème, mais la solution pour faire du fric."
(
entrevue avec René Passet sur Actuchômage)
"« Starlette de la littérature » : ainsi s’autodéfinissait Manchette dans la première lettre qu’il m’écrivit, alors que j’étais directeur de publication de Mordicus , revue qui s’obstinait à défendre des positions anticapitalistes radicales à l’orée des années 90. On eût dit qu’il s’attendait à ce que je lui réponde par la traditionnelle lettre d’insulte. Il était là dans la continuité du texte qu’il a publié dans Les Nouvelles littéraires du 30 décembre 1976, « Cinq remarques sur mon gagne-pain. » Après avoir distingué le roman à énigme, roman du rétablissement du Droit bourgeois, du roman noir, pour lequel l’ordre dudit Droit n’est pas bon, Manchette décrivait ainsi la place de la lutte de classes dans le roman noir : elle n’y est pas absente « de la même façon que dans le roman policier à énigme ; simplement, ici, les exploités ont été battus, sont contraints de subir le règne du Mal. Ce règne est le champ du roman noir.... » Et dans le point 5, relevons : « La fin de la contre-révolution et la reprise de l’offensive prolétarienne sont, à terme, pour les professions intellectuelles, la fin de tout. Entre autres choses, le roman noir va prochainement disparaître, phénomène qui présente une notable quantité d’importance nulle... »
Enfin, il concluait dans un P.S. : « Il ne s’ensuit pas qu’avoir passé, comme on dit, son temps et sa jeunesse à écrire des romans noirs ou dans les Nouvelles littéraires (liste non limitative) sont des choses qui seront automatiquement pardonnées. »"
(Jean-Patrick Manchette, l'écriture de la radicalité, par Serge Quadruppani)