Jamais content

22 juin 2005

Art de la guerre

"Il y a deux façons de considérer le chômage. Dans l'optique de la rentabilité du capital et du patrimoine financier, le chômage, c'est la variable d'ajustement. La finalité c'est le profit et le fric, et le chômage n'est pas le problème : c'est la solution ! Alors on fait semblant de le dénoncer et d'agir contre. Vous savez, moi j'ai l'habitude de rentrer dans la logique du discours des autres : ils disent qu'il faut rémunérer la productivité des gens ? Eh bien, faisons-le ! Quand on licencie, les chômeurs deviennent des agents actifs de cette productivité ! Il faut donc les récompenser et les payer justement ! La prime de Noël, c'est normal ! J'aime bien piéger les gens à leur propre discours... Et le discours de la flexibilité dit bien que le chômage n'est pas le problème, mais la solution pour faire du fric."

(entrevue avec René Passet sur Actuchômage)


"« Starlette de la littérature » : ainsi s’autodéfinissait Manchette dans la première lettre qu’il m’écrivit, alors que j’étais directeur de publication de Mordicus , revue qui s’obstinait à défendre des positions anticapitalistes radicales à l’orée des années 90. On eût dit qu’il s’attendait à ce que je lui réponde par la traditionnelle lettre d’insulte. Il était là dans la continuité du texte qu’il a publié dans Les Nouvelles littéraires du 30 décembre 1976, « Cinq remarques sur mon gagne-pain. » Après avoir distingué le roman à énigme, roman du rétablissement du Droit bourgeois, du roman noir, pour lequel l’ordre dudit Droit n’est pas bon, Manchette décrivait ainsi la place de la lutte de classes dans le roman noir : elle n’y est pas absente « de la même façon que dans le roman policier à énigme ; simplement, ici, les exploités ont été battus, sont contraints de subir le règne du Mal. Ce règne est le champ du roman noir.... » Et dans le point 5, relevons : « La fin de la contre-révolution et la reprise de l’offensive prolétarienne sont, à terme, pour les professions intellectuelles, la fin de tout. Entre autres choses, le roman noir va prochainement disparaître, phénomène qui présente une notable quantité d’importance nulle... »

Enfin, il concluait dans un P.S. : « Il ne s’ensuit pas qu’avoir passé, comme on dit, son temps et sa jeunesse à écrire des romans noirs ou dans les Nouvelles littéraires (liste non limitative) sont des choses qui seront automatiquement pardonnées. »"

(Jean-Patrick Manchette, l'écriture de la radicalité, par Serge Quadruppani)


|| Rom # 18:51

21 juin 2005

This is the modern world

"Beaucoup d'élus préfèrent payer une amende plutôt que d'accueillir sur leur commune des logements sociaux".
(7-9 de France Inter à l'instant).
|| Rom # 08:20

17 juin 2005

Intermède politico-médiatique

"Ce qu’on a vu par contre, et avec fascination, c’est l’application avec laquelle les poudrés entreprirent de ne pas «se couper» totalement du peuple. Le peuple avait ses raisons, après tout. Dont une que l’on pouvait à la rigueur tenir pour légitime : l’impopularité de Raffarin. À ce propos, Moscovici relaya le message déjà martelé par Hollande : ce vote a été un vote de contestation contre Chirac et son gouvernement. Point final. Tu changes de président et de gouvernement, et tout baigne comme avant. Sous la conduite éclairée du PS, le peuple serait à nouveau sous contrôle. Pas une seconde l’idée ne les effleura que c’était aussi à leurs têtes de cons qu’on en avait, à leur bilan au pouvoir, à leur célébration du travail, à leur culte de la laideur, et puis à leurs pauvres mots tout creux, vidés de leur sens comme on éviscère un ortolan."

(Le "Oui" repasse en tête, par Olivier Cyran)

Attention : la lecture de ce texte est déconseillée aux gens raisonnables qui sont persuadés que le peuple ne sait pas lire et que les pauvres sont des cons. Jeunes Giscardiens s'abstenir également
|| Rom # 13:22

13 juin 2005

School's in

Dans le groupe que nous formons depuis quelques jours en vue de travailler sur un projet de site, il y a cet individu à part : ancien pilote de ligne (à la retraite probablement), il a pris la formation dans son option complète - autant dire à plein tarif - et est rapidement devenu la mascotte de la classe : passant ses soirées et ses week-end à faire du code HTML et des animations en Flash (comme d'autres font des maquettes ou de la philatélie), il a donc le temps, pendant les cours, de filer un coup de main à tous ceux qui en ont besoin.

Cet après-midi, j'avais justement besoin de son aide pour mettre une page en forme (je m'enmêle toujours les pinceaux lorsque le nombre de tableaux et de cellules dépasse le chiffre fatidique de 6). Il est assis à côté de moi et me parle tout en mangeant la banane qu'il vient de sortir d'un sac plastique "Franprix". Ce léger chuintement, ces écarts brusques dans l'intonation, ça me rappelle quelqu'un, mais qui ?...

Il est revenu sous apparence humaine et il suit une formation de développeur multimédia, c'est... Alf.
|| Rom # 18:47

10 juin 2005

Attention au photocopillage

"C'est vrai que ça choque : pas de salaire minimum, par exemple, mais un gros pourcentage de syndiqués et des accords de branche directement avec les syndicats pour fixer les conventions. Le licenciement peut arriver simplement en claquant des doigts. Une entreprise qui vire d'un seul coup plus de 10% de ses salariés n'a qu'une seule obligation : prévenir par lettre. Qui finance cette flexibilité ? Le salarié : les impôts sont importants. Le côté positif, c'est qu'on en a pour son argent. Sérieusement. Les infrastructures sont nickel, et je pourrais vous parler pendant des heures de ma bibliothèque municipale. Les formalités administratives sont limitées à un strict minimum. Je suis à mon grand regret un grand consommateur d'hôpital, avec scanners et tout le toutim, et je n'ai pas encore versé le moindre centime. Même quand mon docteur décide de m'envoyer à l'hostau, un véhicule vient me chercher, pour pas un rond.
Le succès de la formule ? Officiellement le taux de chômage a été divisé par deux en une quinzaine d'années."

(Le texte intégral : Villepin lorgne sur le "modèle danois", par O. sur C'est chez nous !)


"Toute analyse concrète des réalités nationales montre qu’elles sont bien plus complexes que ne le suggèrent les comparaisons impressionnistes et les emprunts sélectifs. Il est ainsi particulièrement absurde de se référer à la fois au Danemark et au Royaume-Uni, dont les «modèles» respectifs ont peu de choses en commun. Les libéraux ignorent superbement la cohérence globale de leurs «modèles», parce qu’ils voudraient avoir le beurre sans l’argent du beurre, en ne retenant que ce qui leur convient. Ce qui les intéresse par exemple dans la flex-sécurité danoise, c’est la flexibilité, autrement dit les licenciements faciles, mais pas le volet sécurité, qui coûte cher. Les prélèvements obligatoires représentent en effet 52 % du PIB en Suède et 50 % au Danemark, soit encore plus que les 45 % jugés insupportables en France. Certes, il en va autrement au Royaume-Uni mais le pays phare du libéralisme réserve d’autres surprises. Une bonne partie des emplois créés le sont dans les services publics, et le pouvoir d’achat du salaire y augmente bien plus vite qu’en France : 2,1 % par an contre 0,3 % au cours de la dernière décennie."

(Le texte intégral : Modèles ou trompe l’œil libéraux ? ; "projet de tribune envoyé au Monde, 7 juin 2005", par Michel Husson ; format PDF)


|| Rom # 12:41

08 juin 2005

Phrases du jour

Depuis quelques jours, je suis retourné à l'école, en formation. Devant la profusion de types d'élèves, une profusion de phrases du jour rigoureusement authentiques :

"Ah ouais, hier soir j'ai pas pu refaire mon site parce que mon chien avait mis du shampooing partout dans mon appart'. Tu sais, du Head'n'Shoulders, celui qui mousse..."
(un étudiant ami des bêtes)

"Oh non, le mp3, j'connais pas. Moi, j'utilise le double-v-A-Vé".
(un étudiant porté sur les vieux standards et les abréviations)

"Ah oui, ils en ont parlé hier soir chez Ruquier... Y z'ont dit que c'était le film du moment !"
(une étudiante à propos de Sin City)
|| Rom # 18:59

05 juin 2005

Ce n'est qu'un début

Les Cahiers du cinéma sont visibles et lisibles sur internet. On pardonne l'intro en flash tant le contenu en ligne (pas encore complet) met l'eau à la bouche. Pour savoir le "comment", lire le texte de Claudine Paquot, "Petite histoire d'un grand projet".
|| Rom # 20:58

02 juin 2005

Un monde meilleur



"J'ai une idée : t'as qu'à dire que t'es profondément attaché au modèle social français !"
|| Rom # 08:56

01 juin 2005

Pas de petits profits

"Le compositeur John Cage a écrit en 1952 une pièce intitulée «4’33», entièrement silencieuse: le musicien s’assied, regarde sa montre, et s’en va au bout de quatre minutes et demie, sans avoir fait la moindre fausse note, ni accéléré de manière intempestive (la partition existe, coûte 4,33 euros, ce qui est amusant, mais peu cher, sans doute en vertu de la loi de l’offre et de la demande). En 2002, un rocker anglais, Mike Batt, s’est avisé d’insérer «One minute silence» dans un de ses disques, et de signer la plage: «Batt/Cage». Peters, l’éditeur de Cage, l’a attaqué pour plagiat. En rigolant, Batt a dit que sa pièce était bien meilleure que celle de Cage. Colère redoublée de Peters. Batt a transigé avant le procès, et payé à Peters une somme inconnue, mais considérable: un nombre à six chiffres (en livres sterling)."

(Extrait d'un article fait de bric et de broc mais qu'on peut lire ici)


|| Rom # 01:34